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« A » comme Amour ou comme l’Autre

Au Thibet.

« Voici ce que j’appris de la religion du Thibet : ils appellent Dieu Konciosa, et il semblent avoir quelque idée de l’adorable Trinité: car tantôt ils le nomment Koncikocick, Dieu-un, et tantôt Koncioksum, Dieu-trin.

Ils se servent d’une espèce de chapelet, sur lequel ils prononcent ces paroles, om, ha, hum. Lorsqu’on leur en demande l’explication, ils répondent que om signifie intelligence, ou bras, c’est à dire puissance; que ha est la parole; que hum est le cœur ou l’amour, et que ces trois mots signifient Dieu ».

Chateaubriand, « Le Génie du Christianisme », p.15.

 

 

« A » comme Amour ou comme l’Autre.

Restons en à cette lettre prétendument première de l’alphabet, laquelle de n’être pas appréhendée au travers du filtre ou du masque de la sexuation, ne parvient à évoquer à la personne illettrée aucun sens ni aucune image.

Tentons d’en cerner la raison

Restons en à cette lettre, dont je rappelle que Dieu lui a réservé le destin de devoir être la première des lettres de l’alphabet, mais seulement dans l’après coup de la fin des temps, c’est à dire seulement une fois franchi le seuil de la mort symbolique.

Inscrivons cette lettre « A », de façon à pouvoir l’intégrer à un nœud trèfle, comme suit :

 

Nœud trèfle Lettre « A »

Déformons, à seule fin de la mieux observer , le cadre qui la limite et qui représente ici le sens de la lettre, celui qui est efficace de n’apparaître pas, comme le « +1 » de la lecture (Voir « Illettrisme et Sexuation p.111) ou le « IL » de « il pleut, qui ne sont ni féminin ni masculin. Appelons EVE ce cadre vide de l’évidence que nous appréhendons ici de façon artificiellement extrinsèque, donc visible.

EVE

Inscrivons-y notre « A » pour voir !

A dans EVE

Si je l’insère dans un discours de sexuation, je vais devoir définir schématiquement ce qu’est un homme et ce qu’est une femme.

Définissons le schéma de l’Homme comme sexué.

 

Homme Femme

 

L’Homme (au sens générique) comme sexué, c’est à dire comme n’ayant plus accès au sens de ce qui différencie le masculin du féminin.

En échange de quoi, il a accès aux mots qui contiennent comme un équivalent du sens, cette séparation absolue des sexes, ainsi que celle qui fait chacun être en même temps semblables et diffèrent des autres.

Avant le passage de la mort symbolique, qui correspond à l’enregistrement-oui de la sexuation, l’illettré n’a pas accès au sens de la lettre.

Je vous laisse imaginer la déroute qui peut présider à toute tentative de faire lien homme-femme à ce stade, où toujours l’un des deux est en trop, ce qui fait déboucher toute tentative d’abouchement des deux à la guerre.

La guerre des sexes. Plus sera forte la référence à l’amour et plus la haine se déchaînera comme seule réponse possible.

A ce stade, le vide centrale est purement imaginaire et prête à tous les délires afin de palier au manque d’inscription du triangle central.

C’est ici au lieu de ce triangle qui est aussi le lieu où avant la sexuation, la parole est envisageable comme virtualité que nous plaçons l’endroit où viennent s’inscrire les marques et tatouages imaginaires sur le corps qui tentent, de manière inefficace, de pallier au manque d’inscription symbolique.

Comment est notre schéma de l’Amour, cette chose dont on nous rebat les oreilles, après le passage de la mort symbolique ?

 

L’Amour

 

C’est ici que nous inscrirons la définition de l’amour par Lacan.

L’amour c’est donner à l’Autre ce que l’on n’a pas.

La femme donne à l’homme ceci qu’elle n’a pas:

 

 

Ce qu’elle n’a pas et qui, si elle l’avait, ferait d’elle un être noué:

L’homme donne à la femme ce qu’il n’a pas :

 

 

Ce qu’il n’a pas, et qui si il l’avait ferait de lui un être dénoué :

 

Toujours ce registre de la double négation !

En quoi l’on constate bien qu’il y a une différence des sexes !

 

 

Le sexué est inscrit comme la féminité, à l’encre sympathique sur un support d’absence dans le registre symbolique, c’est à dire la Lettre.

Avant le passage de la mort symbolique, il n’est question que de donner Tout à l’autre, pour le combler.

Une fois franchi le seuil de la castration symbolique, il n’est plus question de pouvoir donner à l’autre que ce que l’on n’a pas.

C’est ça, l’Amour !

 

 

A ce stade, la sexuation est inscrite symboliquement dans la Lettre.

Elle n’apparaît pas plus à ce stade de l’enregistrement-oui qu’avant le franchissement du seuil symbolique, c’est à dire l’imaginaire.

Mais de se trouver archivée dans La Lettre, elle prend toute son efficacité et donne accès à l’Amour par le biais de l’Autre comme tiers absent.

L’illettré refuse de prendre en compte ce qui n’apparaît pas : le sens de la Lettre ou la sexuation en ce qui le concerne.

C’est pourquoi il parvient à lire au nom de l’autre qui ânonne car lui n’est plus en jeu comme être sexué à ce moment là[1].

[1] Voir « Illettrisme et Sexuation » page 111.