« Croire que la science est vraie sous le prétexte qu’elle est transmissible (mathématiquement) est une idée délirante ». Lacan.
Topologie élémentaire appliquée à la théorie psychanalytique.
Pourquoi la Topologie ?
La Topologie permet de travailler sur des dimensions auxquelles nous n’avons pas accès. Or l’Inconscient et ce que nous appelons la Structure, ainsi que le Réel, sont de dimension autre, et nous n’avons accès qu’à leurs conséquences. C’est cette similitude de situation qui fait l’intérêt de la Topologie.
C’est quoi la Topologie ?
La Topologie est une partie des mathématiques qui traite des invariants constatés au cours de manipulations de surfaces. Surfaces auxquelles nous faisons subir par exemple des changements de dimension.
La Topologie prend en compte l’aspect intrinsèque et extrinsèque de ces surfaces. Cela consiste à abandonner le recours à des invariants de mesure.
La dimension est le principal invariant en Topologie.
Prenons l’exemple d’une feuille de papier. Elle possède 2 côtés et un seul bord. Si on enroule la feuille et qu’on colle deux de ses bords opposés, on obtient un cylindre qui dispose toujours de 2 côtés, mais maintenant il a deux bords. Les invariants topologiques:
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Définition de la dimension.
(Extrait du livre de Jean-Michel VAPPEREAU : »Étoffe » : Les surfaces topologiques intrinsèques, éd. TEE). « Un objet sera de dimension n s’il peut être disjoint en deux parties non connexes par une coupure de dimension n-1.
En descendant vers la dimension zéro, la dimension deux est définie par le fait de pouvoir être scindée par la dimension un, celle-ci est une ligne puisque elle-même peut être décomposée par des coupures de la dimension du point, si celui-ci est considéré de dimension nulle.
Les surfaces sont donc ces objets découpés par des lignes; la structure de surface est définie par des coupures de dimension un…
Les coupures de dimension un font les surfaces, elles indiquent la structure de surface. La structure de surface c’est la coupure, et nous appellerons « étoffe » le lieu où s’effectuent ces coupures. »
Ces coupures topologiques ne sont pas sans nous évoquer celles que l’on constate dans la langue que nous parlons, coupures signifiantes sans lesquelles nous ne pourrions nous y retrouver.
Toutes sortes de coupures d’ailleurs sont en jeu. Ainsi, les illettrés n’utilisent jamais le point en fin de phrase, ni la majuscule pour les commencer. Ce sont pourtant des coupures qui engagent notre parole en nous en rendant responsables.
Quelques surfaces topologiques :
La Sphère Le Tore Le Nœud trèfle
L’anneau de Moebius Le nœud borroméen
Illettrisme et Topologie : La Topologie prend en compte (comme un changement de dimension) un travail sur le malentendu, l’erreur, la faute (qu’elle soit d’orthographe ou du pêché originel ) ou le mensonge qui consiste par exemple à présentifier l’absence de l’Autre.
Topologie et inconscient. C’est par la bévue du malentendu et de l’erreur (fôte d’orthographe), que l’inconscient nous fait entrevoir quelque peu le Réel.
Topologie et sexuation: Séminaire La topologie et le temps – 16 janvier 1979 par J. Lacan (Extrait)
« Je suis plutôt embêté de ce que je vous ai annoncé la dernière fois, à savoir qu’il faut un troisième sexe. Ce troisième sexe ne peut pas subsister en présence des deux autres. Il y a un forçage qui s’appelle l’initiation. La psychanalyse est une anti-initiation. L’initiation, c’est ce par quoi on s’élève, si je puis dire, au Phallus. C’est pas commode de savoir ce qui est initiation ou pas. Mais enfin l’orientation générale, c’est que le phallus, on l’intègre. Il faut bien qu’en l’absence d’initiation, on soit homme ou on soit femme. Bon… ».
D’après la lecture de J.D. Nasio, « Les yeux de Laure » : « Transfert, objet « a » et topologie dans la théorie de Lacan », Paris, Champs-Flammarion, 1955
La topologie est introduite par Lacan dans le champ de la psychanalyse pour tenter de rendre compte du réel par des moyens imaginaires, là où les concepts et les nombres s’avèrent insuffisants. Il est clair que la topologie lacanienne n’a rien d’une science, ni même du « désir de faire science », puisqu’elle repose davantage sur une monstration que sur une démonstration.
La topologie des nœuds, à laquelle Lacan consacra la dernière partie de son enseignement, porte si l’on peut dire le paradoxe à la puissance deux, c’est-à-dire jusqu’au Trois du nœud borroméen…
La topologie de Lacan D’après une lecture de Jean-Paul Gilson, La topologie de Lacan, Montréal, Editions Balzac, 1994
Par-delà l’utile formalisation de la pratique analytique, il (Lacan) relie la topologie (notamment nodale) et le thème central du sujet comme refoulé. “Au point qu’on peut se demander si la topologie lacanienne n’est pas pareillement le retour du refoulé, signifiant inconscient dans le théorique qui resurgit dans un réel mathématique pour rendre compte du sujet » (p. 46)
“le fantasme du tétraèdre chez Lacan »
La “bande de Mœbius”, en revanche, est une pure structure, infiniment malléable mais non modélisable : nous verrons que là est le secret du sujet.
Prenons maintenant successivement les quatre phases de la cure et examinons les structures topologiques correspondantes. Nous rencontrerons les premiers “schémas”, optiques et autres, pour les entretiens préliminaires ; le graphe énonciatif pour le désir ; le plan projectif (topologie des surfaces) pour la jouissance ; le nœud amoureux, pour la sublimation.
Pourtant, au final, celui-ci se trouve refoulé à nouveau, plus exactement coincé ou “topoètisé” ! Jusqu’ici nos conclusions faisaient état d’un sujet plutôt éthique. “Savoir y faire avec son symptôme” (c’est le résultat surprenant de cet abord topologique) nous renvoie plutôt à l’esthétique d’une “sculpture de soi” qui trouverait des échos chez d’autres penseurs contemporains…